vendredi 1 mai 2015





Une semaine de mauvaises nuits, avec un genou qui persiste à ne pas se faire oublier,  et cette toute dernière  nuit, le jour se lève  à peine,  j'ai un train à prendre et les yeux qui piquent. Je bougonne,  comme tous les matins de cette semaine. Quand on commence à ronchonner contre soi,  c'est tout qui fout le camp. Je souffle et me dit que non pas aujourd'hui,  c'est  décidé j'arrête la colère. Je ferme la petite valise bleue, celle qui j'ouvrirais et fermerais plusieurs  fois ces jours prochains. Dans les rues de mon quartier parisien,  c'est l'heure que je préfère,  celle où cette ville n'est  pas épuisante, presque un peu timide avec le ciel qui s'ouvre. Je pense à Maman qui va bientôt  partir aussi de Dijon. À ce moment  là je reçois  un message d'elle "chacun sa route". Dans le train je me force à régler certaines obligations, je grince encore un peu, mais cette fois ci ce ne sera que furtif. Et puis parfois il suffit à dire ce qui révolte pour que ça  apaise. Dijon est vite là,  Maman aussi et puis la grande maison. T. sera là à midi. Mais en attendant il n'est que dix heures, le temps pour  Maman de découper des éléphants au chocolat blanc et moi d'en  plier des tout légers.

Avant, à Paris, ou pas loin, il y a une naissance, d'une petite fille avec un prénom en trois lettres, mais qui aurait pu s'appeler comme moi. C'était le vingt avril, le même jour que le frère de J. . Avril, c'est des dates de fin, mais aussi de début, il faut bien, ça marche comme ça. Des journées entières à la crèche, mais seulement une ou deux posées ici et là. Ce ne sera qu'une collègue et à peine deux poignées d'enfants. Petite J., trois ans tout frais du dix huit avril, apprend à se débarrasser de sa couche. Je discute avec son papa, que je trouve merveilleux, à croire que chaque papa que je croise l'est. Le papa de petite J. est impliqué, il rit beaucoup, mais je sens bien en dessous ce qu'il se joue, et cette relation de père-fille, qu'est ce qu'on croit, en fin de compte. Tous les matins, c'est pareil, il dit, je m'en vais, tu me fais un bisou/tu me dis au revoir ?, sa toute petite lui répond de sa voix rocailleuse d'un grognement d'ourson, en baissant la tête et la secouant pour dire non, légèrement désolée. J'ai un peu mal à mon côté paternel, quand il part, comme ça, parce qu'il faut bien quand même. Cette semaine, avec ma collègue, c'est un doux ballet, ménage, cuisine, s'occuper des enfants, ah oui quand même, on est là pour ça. C'est doux si vous saviez, comme à la maison, sans presque de cris, ni de pleurs, des siestes à rallonge, des bougies soufflées sur une tartine de chèvre, des fous rires sur la table de change. Un matin, j'ai même allumé France Inter alors que tous sont au jardin et que je suis en cuisine. ça parle de course à pied, alors j'écoute attentivement, en guettant le jardin et les enfants à moucher/consoler/changer. Un jour, ou cours d'un repas sans mes oreilles qui se crispent, je me dis et je le dis tout haut : c'est comme aujourd'hui que je voudrais travailler. Et j'y songe. Je suis éducatrice mais il se peut que je me rajoute une autre casquette, assistante maternelle, avec d'autres assistantes maternelles, une maison et la paix, tout le monde au même niveau, nos mains dans la même pâte. J'ai commencé à envoyer des messages, lancer des appels. Je me laisse influencer positivement par des projets qui pourraient vraiment voir le jour.

Ce vendredi là, dans le Jura, après la sieste des Malimalé et l'offrande des éléphants, direction le parc. Je regarde ces beaux enfants, mon filleul, avec ses boucles caramel et ses manières pataudes, ses petites dents qui se dévoilent quand je lui raconte une blague, et M., mon premier bébé, qui a quatre ans maintenant, qui est immense, je l'observe. Quelque chose a changé, une nouvelle naïveté est apparue sur son visage. Au parc, leur maman veille au grain, entre deux discussions et quelques princes engloutis. Juste avant que je remonte dans ma petite montagne, je reçois un message du papa de petite J. : "ça y est, elle ne met plus de couches. Et ça c'est trop cool."
Demain, ce sera la route pour Grenoble, puis, Annecy, pour voir un autre bidon bien rond, Genève, un avion pour Majorque, re Genève et Annecy, enfin encore un tout petit peu, le Jura.

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